CitationL'Arabie saoudite reste un pays très rentier dont la principale fragilité est la pro-cyclicité de la politique économique. Les équilibres macro-économiques sont donc très sensibles à la volatilité des prix du pétrole et aux volumes produits et exportés. Le caractère rentier subsistera à moyen terme tant que la diversification de l'économie n'aura pas produit ses effets amortisseurs pour atténuer la cyclicité de l'économie du pétrole.
Les années se suivent et ne se ressemblent pas pour le premier exportateur mondial d'or noir. Après une très bonne conjoncture pétrolière en 2022 où la combinaison d'une hausse de 11% de la production à plus de dix millions de bbl/jour et d'un prix du baril particulièrement élevé à 101 $ en moyenne, le pays avait alors connu une croissance du PIB pétrolier de plus de 15% et de son PIB global de 8,9%. Cette année 2023, le prix du baril s'établit à 82 USD en moyenne sur 11 mois (soit -20%) et la production est en baisse en raison du plafonnement dans le cadre de l'accord OPEP+ (soit environ 6,6% en moins) dans le but d'éviter une trop forte chute des prix. Ce double effet « prix et volume » est donc à l'exact opposé de celui de l'année 2022 et il a provoqué une récession du PIB pétrolier de 6,5% sur les trois premiers trimestres.
Le troisième trimestre a été particulièrement défavorable avec une récession de 17% du PIB pétrolier et de 4,4% du PIB global, la plus forte récession sur un trimestre depuis l'épisode de la pandémie fin 2020. Ainsi, les exportations de biens ont chuté de 24% en moyenne sur les trois premiers trimestres de l'année 2023.
De son côté, le PIB hors pétrole a progressé de 4,7% en moyenne de janvier à septembre, tiré par l'ensemble des secteurs (commerce de détail, transport, activités financières et construction) et donc la consommation des ménages. Mais cela ne suffit pas encore à compenser la très forte volatilité du PIB pétrolier.
Pour le quatrième trimestre, l'épisode récessif devrait se poursuivre compte tenu des contraintes de production et une contraction du PIB de 1% est très probable. Au total, le PIB du pays devrait donc soit stagner (croissance zéro) soit se contracter légèrement de 0,1% sur l'année 2023. C'est une contre-performance assez dommageable pour la stabilité des indicateurs macro-économiques.
Malgré la forte contraction des exportations, le solde courant va rester excédentaire en 2023. Il pourrait atteindre le montant de 62 milliards USD, soit un peu moins de 6% du PIB.
Du côté des finances publiques, la chute conjoncturelle des recettes pétrolières et le caractère toujours assez expansionniste de la politique budgétaire ne permettra pas d'extérioriser des excédents comme l'année passée. Le pays va donc renouer avec les déficits fiscaux, comme au cours des huit années d'avant 2022. Un déficit de 1,5% du PIB est attendu et, dans un contexte récessif, le ratio de dette publique sur PIB devrait donc progresser à 26%, un pourcentage qui reste toutefois très contenu.
Quant à l'inflation, elle va rester très mesurée et ne devrait pas dépasser 2,3% en 2023. Une tendance qui devrait se poursuivre au cours des prochains trimestres.
Qu'attendre de l'année 2024 ?
Un redressement de la croissance du PIB pétrolier de 2% est probable en raison de l'effet de base, d'un pétrole dont les prix devraient se stabiliser autour de 90$/bbl et de volumes de production en probable hausse légère. La croissance du PIB devrait donc se redresser à 3% compte tenu d'une probable conjoncture plus favorable aux marchés pétroliers. De son côté, le PIB hors pétrole devrait poursuivre son rebond d'activité qui pourrait s'établir entre 4% et 5% l'année prochaine. L'inflation devrait rester modérée à 2,2%.
Article publié le 8 décembre 2023 dans notre hebdomadaire Monde – L'actualité de la semaine