La production industrielle a nettement diminué en mai d’après les derniers chiffres publiés par l’Insee. Serait-ce le signe d’une baisse de l’activité économique au deuxième trimestre ? En réalité, cette baisse de la production industrielle pourrait ne pas refléter une véritable tendance de fond, mais au moins en partie des effets de calendrier mal capturés par la correction des variations saisonnières et des jours ouvrables (CVS-CJO) effectuée par l’Insee. En outre, il est toujours utile de rappeler que l’industrie ne représente désormais plus qu’une part modeste du PIB en France, tandis que la production dans les services, principaux contributeurs à la valeur ajoutée totale, a connu une forte hausse en avril.

La baisse de la production industrielle enregistrée en mai est importante : -2,1% sur un mois pour l’ensemble de l’industrie et -2,7% pour l’industrie manufacturière. Toutefois, celle-ci fait suite à une hausse, certes plus limitée, en avril : +0,6% pour l’ensemble de l’industrie et +0,5% pour l’industrie manufacturière. La baisse de la production en mai concerne la quasi-intégralité des grandes branches industrielles, sauf les industries extractives, énergie, eau (+1,1% sur un mois) et la cokéfaction et raffinage (+3,9%). En particulier, la production diminue de 0,7% dans la fabrication de matériels de transport avec une baisse très marquée pour l’automobile ( 6,6%), de 4,6% dans la fabrication de biens d’équipement en lien notamment avec de forts replis dans les produits informatiques, électroniques et optiques ( 5%) et les machines et équipements non classés ailleurs (-5,4%), et de 3,5% dans la fabrication d’autres produits industriels avec une forte diminution dans la pharmacie (-6%) et le textile, habillement, cuir et chaussure (-5,1%). La production diminue modérément dans la construction (-1%) et dans les industries agro-alimentaires (-0,6%). Par type de biens, la baisse de la production en mai est plus marquée pour les biens de consommation durables (-4,1%) et les biens d’investissement (-3,2%) que pour les biens intermédiaires (-2,7%) et ceux de consommation non durables (-2,5%), tandis que la production d’énergie augmente pour sa part (de 1,6%).

D’après des informations émanant de l’Insee (1), la baisse de la production industrielle en mai pourrait en fait ne pas refléter une véritable tendance de fond, mais au moins en partie des effets de calendrier mal capturés par la correction CVS-CJO effectuée par l’Insee, en lien avec le positionnement des jours fériés en mai. Les chiffres de baisse de la production industrielle en mai sont donc à interpréter avec beaucoup de précaution. En outre, une recontextualisation est toujours utile : l’industrie ne représente qu’entre 15% (hors construction) et 21% (y compris construction) de la valeur ajoutée brute en France (chiffres de l’année 2023). Or, la production dans les services – qui sont les principaux contributeurs à la valeur ajoutée brute, à plus de 78% en 2023 – a enregistré une forte hausse en avril (+3,6%). Pour rappel, le PIB est calculé selon l’approche production comme la somme de la valeur ajoutée brute et des impôts sur les produits, diminuée des subventions sur les produits.

Notre opinion – Compte tenu de l’ensemble des éléments mentionnés dans cet article, la baisse de la production industrielle enregistrée en mai a un impact très limité sur notre prévision de croissance pour le deuxième trimestre (qui est de +0,2%), et donc sur notre scénario pour la France.


(1) Voir en particulier l’avertissement présent dans la publication de l’Insee : « Toutes les évolutions commentées dans ce numéro d’Informations-Rapides sont corrigées des variations saisonnières et du nombre de jours ouvrables (CVS-CJO). Cependant cette année, le positionnement des jours fériés a pu amplifier les réductions d’activité en mai. Notamment, l'activité du vendredi 10 mai a pu être fortement réduite, les deux jours précédents ayant été fériés (8 mai et jeudi de l'Ascension). Or le 10 mai n’étant pas férié, il est considéré comme un jour ouvré ″normal″ pour le traitement CVS-CJO. », ainsi que le post de Jean-Luc Tavernier (Directeur de l’Insee) sur LinkedIn : « […] Un avertissement cependant : on se rappelle que ce mois de mai a été marqué par de nombreux jours fériés et surtout un pont particulièrement important les 8, 9 et 10 mai, et il est possible que la correction des jours ouvrés ne permette pas de bien tenir compte de cette configuration exceptionnelle».

Article publié le 5 juillet 2024 dans notre hebdomadaire Monde – L’actualité de la semaine