CitationAu vu des indicateurs avancés, l'activité économique pourrait connaître un ralentissement au deuxième trimestre par rapport au premier trimestre. Certes, il est trop tôt pour juger de l'orientation de l'activité sur la base des enquêtes d'opinion, mais les risques restent orientés à la baisse et ne prennent pas en compte les effets liés aux annonces du président américain.
Une légère reprise dans l'industrie pourrait s'avérer être un effet temporaire et non pas l'inversion du cycle baissier post-choc énergétique. Cependant, la reprise des exportations vers l'Allemagne et l'Espagne sont néanmoins des signaux positifs.
Malgré des signaux contradictoires, le PIB a affiché une croissance positive au premier trimestre 2025, augmentant de 0,3% par rapport au trimestre précédent.
Malgré des signaux contradictoires, le PIB a affiché une croissance positive au premier trimestre 2025, augmentant de 0,3% par rapport au trimestre précédent. Avec ce chiffre, l'Italie fait mieux que ses principaux voisins à l'exception de l'Espagne qui continue d'afficher une forte croissance. La croissance a été tirée principalement par la demande extérieure tandis que les exportations nettes ont enregistré une contribution négative. Du côté de l'offre, la légère reprise de l'activité a été soutenue par une hausse dans les secteurs secondaire et primaire tandis que les services sont restés stables.
Si le détail des comptes n'est pas encore disponible, les indicateurs avancés confirment ce premier constat. En effet, la production industrielle a augmenté de 0,5% au T1 par rapport au trimestre précédent. Cette hausse reste principalement le fait du rebond au mois de janvier. La production industrielle a cependant diminué en février pour se stabiliser en mars, laissant un acquis négatif au deuxième trimestre. D'une année sur l'autre, la tendance reste encore négative mais certains secteurs comme la production de biens de consommation et des biens intermédiaires montrent des signes d'amélioration. Le secteur de la construction devrait également enregistrer une hausse de la production au cours du premier trimestre, poursuivant la phase d'expansion entamée en fin d'année. Le rebond de la production en janvier (+4,7% d'un mois sur l'autre) a certes été suivi par une croissance stable en février mais il permet de laisser un acquis de 4% au T1. Pour ce qui est des services, les signaux confirmant le ralentissement du secteur se multiplient. Après une hausse de 1,3% en janvier, le chiffre d'affaires dans les services recule de 1,3% en février, laissant un acquis tout juste positif de 0,1% au T1 (après 0,7% au T4 2024). Parmi les activités les plus en difficulté, les services professionnels et scientifiques, les services de restauration ainsi que le commerce et la distribution enregistrent tous des acquis négatifs.
Malgré la baisse du mois de mars (-1% par rapport au mois précédent), les exportations augmentent de 4,6% sur le trimestre par rapport au précédent et de 3,2% par rapport au T1 2024. La hausse des importations est également à noter avec une croissance des achats à l'étranger de 4,7% par rapport au trimestre précédent et de 6,9% par rapport au T1 2024, en nette progression par rapport à la tendance des mois précédents. Cette dernière est principalement imputable à la hausse des achats de biens énergétiques, notamment de gaz naturel (+30% au T1 en glissement annuel), permettant de répondre à la baisse des stocks à la suite d'un hiver plus rigoureux.
Certes, les données du premier trimestre sont antérieures aux annonces du "Liberation Day" et donc à l'implémentation des 10% de droits de douane vis-à-vis des pays membres de l'UE, mais la croissance des exportations semble paradoxale au regard du climat protectionniste. Au-delà d'une tendance, la hausse des exportations indique davantage des comportements d'anticipation de la part des entreprises exportatrices, en particulier vers les États-Unis. Ces dernières augmentent de 11% au T1 par rapport au T4 2025 alors même qu'elles avaient reculé de près de 4% le trimestre précédent. Sur le mois de mars seulement, les exportations outre-Atlantique ont bondi de 41% en glissement annuel. Parmi les secteurs qui bénéficient de cette hausse, ceux qui se démarquent sont les plus dépendants de la demande américaine, soit le secteur pharmaceutique dont les ventes vers le reste du monde progressent de 41% au T1 par rapport au T1 2024 tandis qu'elles bondissent de +90% pour ce qui est des États-Unis. Les moyens de transport hors véhicules augmentent également de 21% au T1 (+47% en mars en glissement annuel) mais semblent bénéficier davantage de la réactivation des chaînes de valeur au sein de l'Union européenne qui se traduit par une hausse de la demande allemande et espagnole. Les exportations vers l'Allemagne augmentent ainsi de 5%, rompant avec le repli du trimestre précédent. Celles vers l'Espagne croissent de 9%.
Le début du deuxième trimestre semble moins prometteur. L'indicateur de confiance des entreprises, déjà orienté à la baisse, enregistre un nouveau recul en avril, atteignant son plus bas niveau depuis mars 2021. Tous les secteurs sont concernés par cette baisse. Si les annonces du président américain Donald Trump du 2 avril concernant la hausse des droits de douane ont pu avoir un impact, notamment en ce qui concerne la perception des entreprises concernant la situation économique future du pays, il semble aussi que ce repli de la confiance soit également lié à des facteurs sectoriels propres.
Ainsi, le secteur ayant subi le plus fort repli de l'indice de confiance est celui des services. Déjà en difficulté depuis plusieurs mois, pénalisé par une demande interne faible, il pâtit à présent du recul du tourisme. Depuis le début de l'année, le nombre de touristes étrangers est en recul sur le territoire avec une baisse des entrées de 1,4% pour la période janvier-février par rapport à la même période l'année précédente. Les perspectives détériorées du commerce de détail semblent elles affectées par une évaluation des ventes en baisse, indiquant que la tendance observée au premier trimestre perdure en avril. Effectivement, du côté de la demande, on observe une baisse des ventes au détail en valeur et en volume au cours du premier trimestre qui concerne aussi bien les produits alimentaires que les produits non alimentaires. Les attentes en matière de ventes futures ont néanmoins enregistré une légère reprise, ce qui indique que la tendance pourrait légèrement s'inverser au cours du trimestre. Enfin, même si la confiance se replie également dans le secteur manufacturier en avril, cette baisse reste contenue avec des attentes de production certes en baisse mais avec des signaux favorables qui semblent émerger du côté des commandes futures, notamment pour les biens d'équipement.
Du côté des ménages, la confiance est également orientée à la baisse, plombée par une détérioration généralisée des indicateurs de confiance. Ces derniers anticipent une dégradation de l'activité dans les mois à venir qui impactera leur situation personnelle. Certes, le climat d'incertitude pèse sur les ménages mais d'autres facteurs sont également à prendre en compte. D'une part, bien qu'elle reste basse en niveau, l'inflation s'oriente de nouveau à la hausse depuis le début d'année, se rapprochant de la barre des 2% depuis mars (1,9% en avril en glissement annuel). Si la hausse observée depuis octobre sur les prix des biens se modère sur le dernier point, l'indice des prix des services accélère (de 2,5% en mars à 3% en avril). L'inflation sous-jacente augmente à 2,1% également, rompant avec le cycle de baisse de 2024. La dynamique globale des prix reste néanmoins tirée par les composantes volatiles de l'indice, notamment les biens alimentaires qui repartent à la hausse ainsi que l'énergie réglementée.
D'autre part, les inquiétudes des ménages concernent les effets du ralentissement de l'activité sur le marché du travail. Les données de l'emploi du premier trimestre indiquent qu'elles sont encore bien orientées avec une hausse de l'emploi de 1% par rapport au trimestre précédent, tirée par la hausse des embauches de salariés en contrat à durée indéterminée. Cette hausse se traduit par une amélioration du taux d'emploi qui passe au-dessus de 63% sur la même période, franchissant un nouveau seuil historique. Le taux de chômage, qui est passé pour la première fois sous les 6% en février, baisse également par rapport au trimestre précédent (de 6,1% à 6%). Si le profil du trimestre est positif dans son ensemble, les données de mars indiquent un début de ralentissement qui pourrait correspondre à la détérioration des attentes en matière de demande de travail par les entreprises observées par les enquêtes d'opinion. Ainsi, sur le mois de mars, l'emploi enregistre sa première baisse depuis octobre 2024 à -0,1% tandis que le nombre de personnes au chômage croît de 2,1%.
Notre opinion
Au vu des indicateurs avancés, l'activité économique pourrait connaître un ralentissement au deuxième trimestre par rapport au premier trimestre. Certes, il est trop tôt pour juger de l'orientation de l'activité sur la base des enquêtes d'opinion, mais les risques restent orientés à la baisse et ne prennent pas en compte les effets liés aux annonces du président américain.
Une légère reprise dans l'industrie pourrait s'avérer être un effet temporaire et non pas l'inversion du cycle baissier post-choc énergétique. Cependant, la reprise des exportations vers l'Allemagne et l'Espagne sont néanmoins des signaux positifs.
Bien que la dégradation de la sphère productive, notamment à la suite du choc sur les tarifs douaniers, ait largement été documentée, le ralentissement en sourdine de la demande domestique est également à prendre en compte. La baisse de la confiance des ménages pourrait se traduire par un ralentissement de la consommation plus prononcé, alors même que cette dernière était dans une phase de croissance atone au cours de l'année passée. D'autant que l'amélioration des salaires ne se reflète pas dans le revenu disponible qui a baissé au T4 2024. Le secteur des services, déjà en souffrance, pourrait en pâtir davantage.
Article publié le 16 mai 2025 dans notre hebdomadaire Monde – L'actualité de la semaine